Mardi, il n'y avait pas foule à la Gare Matabiau. Les commerces le ressententPhoto Quentin Marais
Mardi, il n’y avait pas foule à la Gare Matabiau. Photo Quentin Marais

Comme beaucoup de ses sœurs, la gare Matabiau est touchée par le mouvement de grève des cheminots. Si les voyageurs sont les premiers affectés, les commerces qui jouxtent les quais vivent aussi un moment charnière.

« D-Day ». Mais pas de débarquement. Ni d’embarquement d’ailleurs. Ce mardi 3 avril voit la grève perlée se lancer. Si, dans les faits, le mouvement a commencé le lundi à 19h, c’est le lendemain que les premières conséquences se font ressentir. Il est 10h45 dans la gare Matabiau. Les annonces sonores raisonnent plus qu’à l’accoutumée. Elles s’entendent jusque dans les commerces. À l’instar des quais, ils sont quasiment vides. Très peu de voyageurs sont assis sur les bancs. Ils sont encore moins à s’aventurer dans les différentes enseignes de la gare. A l’intérieur de celles-ci, le temps paraît long. Quelques clients viennent, mais repartent aussi tôt, au grand regret des commerçants.

« On subit la grève »

Dans le hall, le Tabac Relay « subit la grève, on préfèrerait qu’ils ne la fassent pas » soupire Vincent Decou, gérant depuis plusieurs années. Le regard un peu perdu, il se gratte la tête en signe de frustration. « Il y a une baisse de fréquentation avec beaucoup de communication dessus, donc les gens étaient au courant et ont pu opter pour d’autres transports » poursuit-il.

Au Monop’Daily, costume gris sur les épaules, Thomas Longuenesse observe minutieusement l’intérieur de la gare. Sans manquer de jeter un coup d’œil aux tables de son commerce. Elles sont seulement investies par une demi-douzaine de clients. « Le chiffre d’affaires chute de « 60 à 70%. C’est pour ça qu’on ferme des unités » déplore le directeur d’exploitation. « On a un plan sur trois mois. Ça risque d’être compliqué pour la réalisation du budget ». La baisse de fréquentation est conséquente. L’enseigne la subit de plein fouet. «  60 à 70% de diminution aussi. Il n’y a pas grand monde » soupire Thomas Longuenesse.

Deux jours, deux ambiances

La tendance est particulière au Quick. Situé entre les deux entrées de la gare, il risque de passer les prochaines semaines sur courant alternatif : « il y a une grosse diminution de fréquentation le jour même, mais la veille de la grève, c’est le double de travail » raconte Manon, jeune serveuse depuis peu. Elle paraît surprise d’avoir du temps pour répondre. En fin de matinée, le rythme est régulièrement beaucoup plus intense. La journée de lundi a été particulièrement éprouvante. « On ne devait être que deux personnes devant, à la caisse, mais on a été obligés de demander à quelqu’un de derrière de venir, raconte-t-elle. Tout le monde part en même temps vu qu’il n’y a pas de grève. »

Les ambiances sont donc totalement différentes d’un jour à l’autre. La foule d’un jour laisse place au calme du lendemain. Il faudra s’adapter jusqu’au 28 juin. Le Quick a déjà anticipé. « Les jours de grèves, il n’y a pratiquement aucun client donc on ferme deux heures plus tôt » conclut Manon. Soit 20 heures au lieu de 22 heures. Dans la matinée de mardi, à l’approche de midi, de nombreuses tables étaient libres. Dimanche 8 et lundi 9, prochains jours de grève, elles ne risquent pas de trouver preneur.

La concurrence fait le plein

Dans la gare, les voyageurs ne se bousculent pas. Ils ne sont pas plus d’une trentaine. Le boulevard Pierre Sémard, en revanche, est bondé. Des dizaines de voitures stationnent. Taxis comme particuliers attendent leurs passagers, qui n’ont manifestement pas tardé à trouver une solution de substitution. C’est notamment le service de location de voitures qui en fait les frais. Moukhtaria travaille pour Avis. Expérimentée dans le métier, elle est forcée de patienter face à l’absence de clients en cette matinée. Le temps semble long. Elle tourne en rond et n’hésite pas à parler de « concurrence. Les gens font appel au covoiturage, avec Blablacar. La gare routière a mis en place des bus également. On n’a pas le monopole » s’exclame-t-elle.

Au-delà de cette bataille à distance, les chiffres sont aussi à la baisse. «  Il y a moins d’activité. On compte 30-40% de réservations en moins, note Moukhtaria. Certaines sont annulées, d’autres ne peuvent être assurées. Mais c’est aussi dû à une clientèle qui refuse de payer plus cher. » En effet, Avis a ajusté son offre dans une période forcément particulière. « C’est tarif plein pot, a-t-elle expliqué. On est censé commencer notre saison en avril. Elle va être en demi-teinte avec cette grève ». Trois mois capitaux, qui risquent sans doute de laisser des traces.